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Marche arrière : Il était une fois Jackie Stewart
Autotitre le dim 26 janv 2020 à 16:10
Tromper la mort.
Par Arnaud A. pour autotitre.com

1968, ses manifestations, ses grèves, la dissolution de l'assemblée nationale, et la mort qui frappe les plus grands pilotes.

@lesoir

Chaque mois, une étoile s'éteint.

Jim Clark le 7 avril, Mike Spence le 7 mai, Ludovico Scarfiotti le 8 juin, et notre Jo Schlesser national le 7 juillet.

Les mouvements de contestation feront reporter les 24h du Mans, mais la Formule 1, en bon bulldozer infaillible, maintiendra le Grand Prix de Monaco.

Un Grand Prix qui se tiendra sans Ferrari, Enzo lui même interdisant à ses équipes de s'y rendre, tenant les organisateurs pour responsables de la mort de Bandini l'année précédente. 68, année de toutes les contestations.

18 voitures au départ, 5 à l'arrivée.

1er Aout 1968. La Formule 1 s'installe sur ce qui est à l'époque le circuit le plus dangereux du championnat. Le Grand Prix automobile d'Allemagne, qui a lieu sur le circuit du Nurburgring. Le vrai, la Nordschleife. 22 kilomètres d'enfert vert, véritable machine à broyer les pilotes les plus aguerris.



Et autant dire qu'à l'arrivée des premiers camions, on sait que ce Grand Prix restera gravé dans les mémoires. Les bancs de brouillard sont partout sur les routes aux alentours, si bien que les premiers arrivés préviendront les directeurs d'écuries pour qu'à leur tour, ils préviennent les pilotes de ne pas partir à la dernière minute. Il était encore coutumier à l'époque que les grands noms prennent la route à bord de leur voiture personnelle pour rejoindre les circuits d'Europe.

Plus tard, on apprendra que Jackie Stewart avait une habitude lorsqu'il se rendait au Nurburgring. Celle de regarder une dernière fois sa maison dans son rétroviseur, n'étant jamais certain de revenir. En 1968, il n'a pas pu le faire, son écurie mettant à sa disposition un jet privé.

Lorsqu'il mis le pied sur le tarmac de l'aéroport, Stewart se remémore immédiatement Spa 66. Loi de Murphy: Tout ce qui est susceptible d'aller mal ira mal.

Stewart retourne sa BRM suite à une prodigieuse averse, personne n'arrive à le désincarcérer de sa voiture, et lorsqu'enfin il se retrouve dans l'ambulance, celle ci se perd sur les routes ardennaises, au milieu de l'orage qui gronde.

Forcément, son arrivée au milieu d'une averse qui ne s'arrêtera jamais vraiment du week end, lui coupa la chique.

Calculateur, Stewart attendra à chaque séance de qualification le meilleur moment pour partir. La séance de vendredi matin se fait dans le brouillard, celle de l'après midi est annulée.

Samedi matin, personne ne réveille les pilotes. Un silence pesant plane sur le paddock, tout juste entend on le brouhaha du public, venu en masse malgré les conditions dantesques. Grâce aux conditions dantesque? ...

La pluie tombe si fort, que Jean Pierre Beltoise quittera carrément le paddock pour aller déjeuner dans une petite auberge non loin de là, conseillée par un commissaire de piste local. La panse pleine, Beltoise revient au paddock lors d'une éclaircie, et voit Servoz Gavin au volant de sa monoplace en train d'effectuer les 6 tours réglementaires pour se qualifier au Grand Prix d'Allemagne. Stewart ne partira pas.



Dimanche matin. Le public toujours plus nombreux permettra à ce Grand Prix d'entrer dans la légende.

Des essais sont improvisés le dimanche matin, juste avant le Grand Prix, pendant lesquels Stewart décrochera le 6e temps. Inutile de préciser que le Rainmaster Jacky Ickx détient la pôle, presque une minute devant Stewart!



Stewart essaiera une dernière fois d'annuler la course de l'après midi, en soulignant le lourd prix déjà payé cette année. Matra l'en dissuadera.

Stewart dispose d'une Matra dotée d'excellents pneus Dunlop ayant fait leurs preuves sous la pluie un peu plus tôt à Zandvoort, et d'un amortisseur de direction lui permettant de courir malgré l’attelle encore présente à son poignet suite à son accident en Formule 2. Un amortisseur qu'il demandera qu'on lui retire, en plus de durcir sa direction à l'extrême. Quitte à être obligé de rouler dans ces conditions, l'anglais veut sentir son train avant au maximum, quitte à ce qu'il résonne jusque dans ses os blessés.

Tyrrel ordonnera qu'on creuse davantage les rainures des excellents Dunlop, sans aucun calcul d'ingénieur, juste au feeling.

Conditions météo obligent, une voiture est retirée de chaque ligne de départ. De 4-3-4 on passe à 3-2-3.

Le départ est donné, si tout le monde patine, Ickx le fougueux se rate complètement, et se fait déborder par Hill et Amon. Stewart profite de la motricité offerte par ses Dunlop retaillés pour faire un saut de 3 places. Stewart le calculateur à aussi un instinct, qui lui ordonne de passer en première place TOUT DE SUITE, pour ne pas avoir à rouler dans les projections d'eau de ses camarades.

https://www.youtube.com/watch?time_continue=71&v=fgd6F-i0JTs&feature=emb_logo (Grand Prix (1968) - YouTube)
YouTube -
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Avant le pont d'Adenau, il passe devant la Ferrari d'Amon, et dépose littéralement la Lotus de Hill à la sortie du petit Karussel. Stewart est en tête, et ne la quittera plus. On apprendra plus tard que lorsque Amon doubla Ickx, sa Ferrari a lâché des volutes d'huile sur le casque de Ickx. Celui ci ne trouvera alors comme solution que d'arracher sa visière. Il rentrera au stand au bout du second tour, les yeux en sang, pour repartir de plus belle, et terminer à une honorable quatrième place compte tenu des conditions.

Devant, c'est l'apocalypse. De tour en tour les flaques changent d'endroit sur la piste, se transforment en ruisseau, le brouillard s'épaissit, et on assiste à un véritable balai de héros flirtant avec la mort, roulant à l'aveugle sur le circuit le plus sélectif du monde, dans des conditions apocalyptiques.

Derrière Stewart, personne ne suit, tout le monde survit. Siffert double Surtees en perdition sans même l'avoir vu, le drame étant évité de justesse, Hill part en tête à queue à Adenauer Forst, et se rattrape miraculeusement, Ickx doit composer avec des blocages de différentiel intempestifs, tandis que celui d'Amon casse net, l'envoyant dans le décor sans gravité.

Même Stewart glissera sur plusieurs dizaines de mètres, avant de rattraper sa voiture à quelques centimètres d'un commissaire de piste cocu.



Ce jour là, Stewart sera le plus fort. Il dira aux journalistes qu'il n'a pas battu ses camarades. Il a battu ses peurs. Pendant les 2 heures et 19 minutes de bataille, sa concentration sera telle que ses peurs passeront au second plan. Il n'y avait pas de place pour penser à la piste et à l'accident potentiel.

Stewart arrivera avec 4 minutes d'avance sur le second, un record qui tient toujours.

Juste après le drapeau à damiers, Stewart n'aura aucune parole pour son écurie. Ses premières paroles sont pour ses frères. "Sont ils tous en vie? ". Il sait trop ce que courir dans ces conditions peut coûter. Ce jour d’août 68, le destin ne frappera pas.

Stewart deviendra champion du monde l'année suivante, ainsi qu'en 1971 et 1973. Il détient à ce jour le record de victoires sur la version longue du Nurburgring, ex-æquo avec un certain Juan Manuel Fangio. Ironie de l'histoire, juste avant de revendre son écurie à Ford, Stewart obtiendra une dernière victoire homérique...Au Grand Prix d'Europe 1999, sur le Nurburgring.



Jacky Ickx, lui, lorsqu'on lui demande si il n'est pas déçu d'avoir perdu et failli à sa réputation de rainmaster, répondra avec son sourire légendaire au journaliste "Aujourd'hui, tous les pilotes ont gagné."
Dernière édition le 27/01/2020 à 15:25 par carpe.diem, édité 1 fois
Turbo1980 le dim 26 janv 2020 à 16:23
:good: :good:
caraddict le dim 26 janv 2020 à 17:30
Plus un ballet qu'un balai non ? :D Sinon sympa à lire même si je suis pas hyper branché vieux sport auto ;)
ctncrsp le dim 26 janv 2020 à 19:14
:good:
Belle histoire bien racontée
CaTerHam_7 le dim 26 janv 2020 à 20:36
:good: :good: :love: bravissimo !
Bérangère le dim 26 janv 2020 à 22:50
Bien raconté :D
SaluC1 le dim 26 janv 2020 à 22:59
:good: excellent :good:
jpcevol le lun 27 janv 2020 à 07:04
Génial :good:
Ami8 le lun 27 janv 2020 à 15:23
L'article est top mais serait-il possible de remettre la bonne orthographe du prénom du champion dans le titre ? ;)
kb993 le lun 27 janv 2020 à 15:35
Bel article! Et c'est toujours sympa toutes ces anecdotes :good:
ctncrsp le lun 27 janv 2020 à 15:38
Citation de Ami8 :
« L'article est top mais serait-il possible de remettre la bonne orthographe du prénom du champion dans le titre ? ;) »


C'est bien Jackie pourtant :louche:
À ne pas confondre avec "un Jacky" :D
Ami8 le lun 27 janv 2020 à 15:45
A 15h23 le titre était encore "Il était une fois Jackye Stewart" ;)

Un Jacky féminin peut-être ? :D
ctncrsp le lun 27 janv 2020 à 15:47
Pimp my ride avec Valérie Damido
carpe.diem le lun 27 janv 2020 à 15:49
Jackye et Mitchell
Ami8 le lun 27 janv 2020 à 15:50
Un vaillant ce dernier :good:
EenSayn le lun 27 janv 2020 à 19:24
Chouette récit :)
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